Depuis belle lurette, les philosophes et les individus réfléchissent à la notion du temps. De Platon à Pascal, de Kant à Sartre, des discussions entre amis aux débats dans les cafés, le temps intrigue, angoisse et enchante. À l’heure du confinement, il revient souvent dans le vif des conversations. Pourquoi donc?
L’asservissement au temps
Avant la Révolution industrielle, le temps n’était pas segmenté comme aujourd’hui. Les gens se fiaient au soleil pour aménager leurs journées. Le temps naturel rythmait leur quotidien. L’industrialisation a fait gagner aux horloges leur popularité grandissante et dicter aux hommes le devoir de ponctualité. Les heures ont existé, puis les minutes et les secondes. Le travail et toute la vie se trouvaient désormais réglés par le tic-tac.
En 2020, c’est toujours d’actualité. La course au temps et la course contre le temps à la fois nous essoufflent et nous donnent l’impression d’exister. C’est un dilemme continuellement ruminé. Et voilà que le confinement nous exhorte, pour la plupart, à ralentir la cadence.
Si le temps de Newton est un temps absolu et que le temps d’Einstein varie selon le mouvement, le temps de l’homme au cœur de l’isolement devient plus que jamais un temps subjectif. Le temps de la conscience, comme l’a nommé Bergson, est dans tous les esprits, même chez ceux qui ne le savent pas. Le temps objectif, celui de la mesure commune, continue de contrôler nos journées et notre routine, mais notre perception du temps tend à se modifier.
Vous trouvez le temps trop long?
Ceux qui ne travaillent plus ou qui étaient très actifs peuvent avoir l’impression que les heures sont devenues interminables. C’est sans doute la sensation la plus répandue. Ils tournent en rond, se posent mille questions, cherchent quoi faire et ressassent l’ennui qu’ils éprouvent. Quand le temps n’est pas comblé par l’activité (physique ou mentale), il semble prendre du retard sur celui qui régule l’existence mouvementée d’autrui. L’humain cherche à se divertir, à conquérir, à s’activer et à accumuler des biens pour lutter contre sa finitude (théorie du divertissement de Pascal). Ainsi, il combat le temps et le fuit parallèlement.
Or, aujourd’hui, la pandémie nous oblige, comme tout un chacun le sait, à faire de l’introspection, à diriger nos choix vers ce qui nous correspond vraiment et à prendre conscience des merveilles qui nous entourent. En somme, ce n’est probablement pas le temps de trouver le temps trop long. C’est plutôt le temps d’apprivoiser la lenteur, le simple fait d’être et la féerie qui cogne à nos portes.
Vous trouvez le temps trop court?
Malgré le ralentissement de la planète, certains trouvent le temps désormais trop court. Ils entament des projets et font ce qu’ils n’avaient plus le temps de faire. Ils multiplient les tâches ménagères, les appels, les courriels et les recherches Google. Ils marchent trois fois par jour, cuisinent et acquièrent des compétences. Ils font l’école à leurs enfants et s’entraînent à la maison. Bref, ils se couchent en ayant laissé inachevés des ouvrages qu’ils avaient prévus. Au final, ils se demandent comment ils arrivaient, il y a pourtant si peu de temps, à tout concilier.
C’est mon cas. Chaque jour, j’essaie de faire le calcul des heures par rapport aux obligations et je n’arrive pas à comprendre comment je parvenais à travailler 12 heures par jour, à aller à la gym, à garder la maison propre, à souper avec des amis et à faire mille et une sorties. Depuis le confinement, je trouve le temps trop court. Mon temps subjectif passe à une vitesse ahurissante.
L’effort est nécessaire au bonheur
Dans les deux cas, il est possible que nous ne percevions plus l’agréable ni le beau. Nous sommes soudoyés par notre mental qui accrédite des pensées de toutes sortes, de cafard comme d’essoufflement. Nous dévorons les heures aveuglément ou affirmons que le confinement est ennuyant à mourir. Mais si l’effort était nécessaire au bonheur?
Cela m’apparaît sensé puisque tout désir de se sortir d’une situation, par exemple, exige de la volonté et un effort de ténacité. Au même titre, le souhait de voir la vie à son meilleur et de respirer la joie impose l’effort de la résilience, de l’action ou, du moins, de l’attention ardente. Plusieurs me demandent des idées d’activités pour en finir avec la monotonie, mais quand je leur en donne, ils estiment que l’effort est trop demandé. Ils retournent donc à leur sofa, leur télécommande et leur sempiternel ennui dont ils inondent le monde.
Le bonheur ne ménage pas l’effort. Le merveilleux ne l’épargne pas non plus. Si vous voulez être heureux, souriez et appréciez le plus grand nombre de choses. Débusquez la magie du quotidien et faites tout en votre possible pour faire naître le merveilleux dans votre cœur et dans celui des autres. C’est le temps du confinement. C’est le temps parfait pour vous y mettre!
"L'attention ardente"voilà, je pense, la clef maîtresse en tout, le premier niveau du bonheur. C'est elle qui nous permet de voir pas seulement de regarder, qui nous permet d'entendre pas seulement d'écouter. C'est un effort intellectuel constant si facile qu'il en devient une habitude, une façon de vivre. L'attention ardente c'est un effort de concentration, d'attention active, de focalisation. La perspective c'est le deuxième niveau du bonheur. C'est ce qui nous permet de situer dans un ensemble plus grand, plus global le résultat de l'effort. C'est ce qui nous permet de relativiser et c'est à ce niveau que l'on trouve l'excellence, l'élitisme, l'exceptionnel. C'est la seconde dimension, celle qui nous donne la mesure de la première. C'est l'espace temps.
L'instant présent nous invite à respirer ce moment de pause pour nous faire réaliser que l'espace-temps est une onde énergétique de lumière. Comme une fréquence radio, elle se mouvoit, se tort, se relantit au grés des formes qu'elle contourne pour arriver à sa destination. Soyez lumière et vous saurez le bonheur d'être.